Le 13 février 2013, le réseau international “Justice pour Sankara Justice pour l’Afrique” a organisé en collaboration avec l’association SURVIE et le groupe parlementaire Europe Ecologie les Verts (EELV), et les députés du Front de gauche du groupe GDR (Gauche Démocrate et Républicaine) une conférence de presse afin d’informer du dépôt d’une demande d’enquête parlementaire. Cette demande dans sa conclusion précise : “Nous devons répondre aux questions suivantes : pourquoi Thomas Sankara a-t-il été assassiné ? Comment cet assassinat a-t-il été rendu possible ? Quels rôles ont joué les services français et les dirigeants français de l’époque ? La DGSE savait-elle ce qui se tramait et a-t-elle laissé faire ?” (voir à thomassankara.net/?p=1390).

On trouvera après le compte rendu un extrait d’un article de Mediapart où figure des extraits d’une interview de Pouria Amirshahi, député socialiste et secrétaire de la commission des affaires étrangères. Il a tenu, depuis à nous écrire directement pour préciser sa position. Vous trouverez aussi ci-dessous le courriel qu’il nous a fait parvenir via le site.

On notait notamment la présence de journalistes de Jeune Afrique, RFI, Mediapart, Afrique Asie, Afrik.com et une correspondante d’une radio allemande. Africa N°1, avait confirmé sa participation, mais n’a envoyé personne mais devait inviter Maitre Bénéwendé Sankara à une émission en collaboration avec la BBC, le vendredi 15 février. Malheureusement les artistes prévus; Didier Awadi et Balufu Bakupa Kanyinda n’ont pas pu se libérer. M. Elisée Coulibali, historien est arrivé en retard mais a pu être interviewé. par les journalistes présents.

M. Bruno Jaffré, au nom du réseau international “Justice pour Sankara justice pour l’Afrique” a rappelé l’historique de la campagne, et les 12000 signatures déjà recueillies à la pétition à http://thomassankara.net/?p=866; le symbole que constitue Thomas Sankara pour le continent et son assassinat comme agissement de la Françafrique. Il a lancé un appel à Harlem Désir, aujourd’hui président du parti socialiste, et à tous les socialistes pour qu’ils ne fassent pas barrage à cette demande, rappelant que Harlem Désir avait été reçu par le président Thomas Sankara lorsqu’il était président de SOS racisme.

Le député André Chassaigne du PCF (parti communiste) – Front de gauche, chef du groupe parlementaire GDR a expliqué les raisons de l’engagement de son parti dans cette bataille, expliquant qu’il en allait de l’honneur de la France et de la démocratie. Il a ajouté que accepter une telle requête permettrait sans doute que s’améliore les rapports de coopération.

Le député Serge Coronado, du groupe EELV, a rappelé qu’ils étaient à l’origine de la première demande d’enquête parlementaire sur le sujet en 2011. Il a rappelé se souvenir aussi de la forte impression qu’avait eu Harlem Désir de son séjour au Burkina, peu avant l’assassinat de Thomas Sankara.

Les deux députés, ont expliqué les procédures pour qu’une enquête parlementaire soit acceptée, indiquant qu’il y avait une possibilité que la demande soit étudiée au mois de mai. Après un bref échange, entre eux, ils se sont mis d’accord pour avoir une démarche commune auprès du groupe socialiste pour qu’il accepte cette demande d’enquête parlementaire, ajoutant qu’il en comprendrait pas pourquoi ce dernier refuserait, vu que les faits se sont déroulés il y a plus de 25 ans et que les enjeux en sont donc réduits

Maitre Benewendé Sankara, avocat de la famille Sankara, président de l’UNIR/PS (Union pour la renaissance, parti sankariste) a rappelé le long combat judiciaire mené depuis de longues années au Burkina sans qu’une quelconque procédure aboutisse, la sollicitation de comité des droits de l’homme de l’ONU qui avait d’abord semblé soutenir les demandes de la famille pour finalement se satisfaire de pis aller de la part du gouvernement burkinabè. Il a rappelé et remercié les députés français des deux groupes représentés pour avoir répondu à la requête de 12 députés de l’opposition burkinabè de la précédente législature qui leur avait écrit pour solliciter qu’ils fassent une telle demande d’enquête parlementaire.

M. Danyel Dubrueil de l’association SURVIE a rappelé le symbole que représente l’assassinat de Thomas Sankara comme agissement de la Françafrique. Il a expliqué que l’ouverture d’une enquête sur la participation de la France dans cet assassinat était une vraie opportunité de mettre fin au cycle de l’impunité de la Françafrique. Il a exposé la position de l’association Survie sur les contreparties politiques données aux dictateurs amis de la France pour l’envoie de leurs troupes dans la guerre au Mali, et notamment celle de Blaise Compaoré, et souhaité que la vérité sur l’assassinat de Thomas Sankara ne soit pas sacrifiée au profit de l’impunité de Blaise Compaoré et en remerciement de sa participation à la guerre française au Mali.

Malgré le peu de journalistes présents, l’impact de la conférence de presse est assez important sur la toile, plus particulière en Afrique, grâce à la publication sur le site de RFI d’un courte interview du député André Chassaigne.

On trouvera un dossier fourni, réalisé pour soutenir de la demande d’enquête parlementaire à http://thomassankara.net/?p=1459.

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On trouvera ci-dessous un extrait vidéo de la conférence de presse.



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Extrait d’un article de Mediapart publié le 19 février à la suite de la conférence de presse. A noter la réaction de Pouria Amirshahi, député socialiste et secrétaire de la commission des affaires étrangères

Sergio Coronado, député écologiste, se souvient des batailles communes menées par les socialistes et les écologistes lors de leurs années sur les bancs de l’opposition afin que le Parlement pèse de tout son poids pour contrôler l’action de l’exécutif dans le domaine des affaires étrangères : « Je ne veux pas croire qu’une fois arrivés dans la majorité, on défende des choses différentes de celles que l’on défendait dans l’opposition », déclarait-il mercredi matin à l’Assemblée.

À propos de Thomas Sankara, Sergio Coronado ajoute qu’il se souvient de l’époque où il militait à SOS Racisme avec Harlem Désir, l’actuel premier secrétaire du Parti socialiste : « Il avait été accueilli dans la famille de Thomas Sankara pendant plusieurs jours au cours d’un voyage au Burkina Faso, et était rentré très ému. »

Bases de respect

À ces questions de crédibilité pour le PS s’ajoutent celles de François Hollande, dont l’engagement 38 du programme présidentiel prévoyait de « rompre avec la Françafrique, en proposant une relation fondée sur l’égalité, la confiance et la solidarité ».

Pourtant, « François Hollande a engagé la France dans une intervention militaire au Mali dont les dictateurs africains Blaise Compaoré et Idriss Déby sont des soutiens clés », déplore Danyel Dubreuil de l’association Survie.

André Chassaigne, député du Front de gauche et président du groupe de la Gauche démocrate et républicaine à l’Assemblée, déclarait quant à lui : « Le contexte de l’intervention au Mali rend peut-être la démarche plus difficile, mais j’aurais tendance à dire qu’au contraire, si cette intervention militaire au Mali se fait sur des bases de respect de l’Afrique, de ses peuples et de son développement, alors ça ne doit pas être un barrage au travail de cette commission d’enquête. Ce serait même faire la démonstration que ce qui motive la France aujourd’hui, ce ne sont pas les intérêts économiques de domination néo-coloniale, mais une volonté partagée d’un développement harmonieux de l’Afrique où la France n’intervient pas en maître. »

Quelles que soient les motivations du Parti socialiste pour soutenir la démarche du Front de gauche et d’Europe Écologie, sa position se révèle d’autant plus essentielle que sans l’engagement de son groupe parlementaire, la mise en place d’une commission d’enquête s’annonce difficile. En effet, le règlement de l’Assemblée nationale rend nécessaire l’accord majoritaire des présidents de groupe et, à défaut, donne la possibilité à chaque groupe parlementaire de réclamer la création d’une commission d’enquête une fois par an. Or ce droit de tirage a déjà été épuisé cette année par le Front de gauche et Europe Écologie.

Interrogé sur l’opportunité de la mise en place d’une commission d’enquête sur la mort de Thomas Sankara, Pouria Amirshahi, député socialiste et secrétaire de la commission des affaires étrangères, précise que « l’implication des parlementaires dans les affaires étrangères est une nécessité démocratique. Toutefois, la création d’une commission d’enquête parlementaire implique l’existence préalable d’éléments probants car il s’agit de l’engagement d’une institution républicaine qui ne se fait pas à la légère ». Les socialistes semblent donc conditionner leur soutien à la démonstration préalable de l’implication française dans l’assassinat de Thomas Sankara. Selon eux, la mise en place d’une commission d’enquête non fondée sur des éléments de preuve impliquant la France pourrait même poser problème. « Si aucun élément à ce stade ne prouve la participation de la France, pourquoi et au nom de quoi enquêterait-elle au Burkina Faso ? Il ne faut pas donner l’impression que la France vient s’immiscer dans les affaires du Burkina Faso. »

Cette prudence politique se double d’un sens certain de la nuance. « Thomas Sankara est un personnage à double face, qui a incarné l’émancipation et l’indépendance véritable, mais qui a aussi été tenté par la violence », précise Pouria Amirshahi. Quant à Blaise Compaoré, dont les agissements à la tête du Burkina Faso sont dénoncés par l’opposition burkinabé et l’association Survie, « il ne faut pas être binaire, il a aussi été stabilisateur dans la région », déclare Pouria Amirshahi. Plus d’un quart de siècle après la mort, la légende de Thomas Sankara est donc bien toujours celle du combat pour l’intégrité.

Source : http://www.mediapart.fr/journal/international/180213/fdg-et-eelv-veulent-une-commission-d-enquete-sur-l-assassinat-de-thomas-sankara

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Un mail reçu de Pouria Amirshahi le 22 mars 2013

Monsieur,

Suite à un article publié sur Mediapart à propos de l’éventuelle création d’une commission d’enquête parlementaire consacrée à l’assassinat de Thomas Sankara, je tenais à clarifier ma position. Mes propos tels que repris dans l’article sont exacts et je ne les conteste pas. Cependant, la manière dont cet entretien oral a été rapporté ne permet pas de saisir l’ensemble de mon argumentaire. Je vous propose de le reprendre succinctement ici.

Les mérites de Thomas Sankara lors de son passage à la tête de l’État burkinabé sont connus : alphabétisation, vaccination, autosuffisance alimentaire, etc. Lorsque j’évoque une tentation pour la violence, je ne parle pas de lutte politique qui, quelquefois, peut y avoir recours face à des dictatures ou à l’oppression. Je me référais simplement aux groupes se réclamant de Sankara et qui, selon certains témoignages, se comportaient parfois comme des milices ou des bandes vivant du racket des populations civiles.

Concernant plus précisément la commission d’enquête parlementaire, je ne suis pas opposé à son principe, d’autant plus que les circonstances de l’assassinat de Thomas Sankara sont loin d’être élucidées. Je désire simplement que soient portés à notre connaissance des éléments préalables avant de prendre la décision, lourde, de nous ingérer dans les affaires burkinabè.

Enfin, je veux profiter de ce message pour réaffirmer mon soutien aux exigences légitimes de la société civile et de l’opposition démocratique burkinabè, jusque-là trop peu entendues.

Pouria Amirshahi, Député des Français de l’étranger (Maghreb/Afrique de l’Ouest)

— Envoi via le site [Thomas Sankara webSite] (http://thomassankara.net/) —

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