samedi 16 octobre 2010

Haïdara Chérif

Nous l’apprîmes de Faulkner que le passé n’est pas mort et enterré et qu’en fait, il n’est même jamais passé. Il nous faut constamment interroger notre passé pour savoir ce que nous avions accompli, pour savoir où nous allons, pour savoir qui a fait quoi et pourquoi. Nous ne sommes pas dans le passé quand nous nous évaluons selon le barème de ceux qui, pour nous, méritent notre révérence, notre déférence ou notre mépris.

La mort s’est toujours régalée de notre chaire, elle a toujours triomphé de notre corps, elle s’est montrée impitoyable quant à sevrer le nourrisson du sein maternel qui devait lui donner vie et espoir. La mort a su imposer cette nostalgie mélancolique à notre cœur meurtri par l’effet de la séparation éternelle. Que le seigneur soit acclamé ! La mort ne consume que ce qui est matériel.

Elle n’a pu effacer l’œuvre des bienfaiteurs de l’espèce humaine, elle n’a pu non plus éteindre de son souffle macabre la flamme éblouissante qu’illumine notre cœur à l’audition des noms comme Thomas SANKARA, Steve BIKO etc.…Des noms liés à un idéal, à des symboles, à des époques, à une histoire du noir ou que dis je, de l’Homme simplement. Celui là qui est décrit dans l’Ancien Testament de l’Esprit du Très Exalté.

En ce 15 Octobre 2010 nous interrogeons encore le passé comme nous le faisions depuis 23 ans. Comme vers le soleil, nos regards et nos sentiments voyagent inlassablement vers Ouaga au Pays des Hommes Intègres. Là bas, il y a un homme intègre qui continu à interpeller tous nos sens. Souvenez vous : « Les morts ne sont pas morts ils sont dans le vent qui souffle…ils sont dans l’eau qui coule… » En effet, rien n’a pu trucider un esprit.

Sous nos pieds, aux cotés de tant d’autres repères, git un monument maintenant immatériel, un colosse baobab aux racines indétrônables suffisamment enfoui dans le sol pour résister aux vents et aux intempéries. Ni la calomnie ni la délation n’ont affecté sa aura et sa continuelle ascendance dans les jeunesses de notre temps.

Ha ! Quel souvenir ! C’est encore limpide dans nos méninges et pourtant nous étions adolescents ou presque, c’est peut être aussi la raison, le psychologue pourra en faire une étude.

Sous le ciel africain ensoleillé de ce Jeudi 15 Octobre 1987, la nouvelle fracassante de l’assassinat de Thom Sank retentissait dans toutes les contrées du continent comme une cloche d’église au zénith de la nuit de la Noëlle. C’était abasourdissant ! C’était époustouflant ! C’était….hum !!! Excusez les larmes de l’émotion qui imbibe ce papier et réduit notre visibilité. Enfin ! Tout compte fait, c’était six ans après Bob MARLEY, dix ans après BIKO, dix sept ans après CABRAL, vingt deux ans après Malcolm X…La fidèle mort a su toujours retrouver l’étendard noir où qu’il se trouve et l’arracher trop tôt aux siens

SANKARA, que vous le réalisiez ou pas, était porteur d’un message nouveau, c’était une autre race de leader que les adeptes du statu-quo d’ici et d’ailleurs ne pouvaient accepter.

Nous le savions de Christophe Colombe que : « Rien de ce qui résulte du progrès humain ne s’obstient à l’assentiment de tous, et ceux qui aperçoivent la lumière avant les autres sont condamnés à la poursuivre en dépit des autres » et malgré eux aussi. Nous pensons, et c’est le cas de tous les précurseurs, que SANKARA est tombé sur le champ d’honneur en se battant pour une valeur qui a fait défaut dans la classe politique africaine de l’époque et qui continue à se raréfier davantage de nos jours. Le courage. Que peut-on accomplir sans cette valeur ? Le martyr ! Comme en Babylone Ousseïne ibn Ali et soixante onze de ses disciples ont choisi le martyr, en lieu et place de se trahir, devant les forces de Maaouiya à Karbala. Ils n’avaient autre alternative à la mort que le combat. Thomas Isidore SANKARA n’avait autre issue aux événements du jour que ce destin fatal. « Si je dois être trahi par les miens, il est déjà trop tard…. ». Il l’a assumé afin que nous nous souvenions.

Tuer pour ne pas être tué. Trahir pour ne pas être trahi. Est-cela la gestion des affaires de la cité ?

Les coupables arrivent à justifier presque tout ce qui ne se justifie pas à la conscience par un renversement de rôle digne de la torture morale. Il y a ceux qui, comme cet ami avec sa vision du Far West, voit le jeu politique en termes de duel : le premier qui dégaine est celui qui survit. Et ceux comme Emile Auguste Chartier qui pensent que : la gloire, en politique, est le salaire de l’injustice. Toi qui rétrécis la perte de Thom Sank à la logique politicienne et conclus, comme au jeu du hasard, que c’était pile ou face c’est-à-dire l’un ou l’autre des « frères », écoute donc Frantz FANON : « Le châtiment que nous méritons ne peut être détourné qu’en niant la responsabilité du mal, en rejetant le blâme sur la victime, en prenant du moins à nos yeux, qu’en frappant le premier et unique coup nous agissons simplement en légitime défenses ».

SANKARA est devenu plus grand mort que vivant. Le plus illustre des fils de mère Burkina Faso a légué à la postérité un fardeau que ne peut charger que seul ceux pétris de qualités humaines et dont la devise est dans Jean 15 verset 13 : Il n’y a de plus amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. Aucune société ne peut faire l’économie du sacré. Le sacré ici c’est bien toi. Isidore, dors en paix. Vis en nous comme espoir, comme esprit.

La patrie ou la mort nous vaincrons !

Haïdara Chérif

Source : http://djaladjomathematiques.blogspot.com

LAISSER UN COMMENTAIRE

Saisissez votre commentaire svp!
SVP saisissez votre nom ici

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.