Ernesto Che Guevara et Thomas Sankara, deux révolutionnaires que tout unissait. Le premier inspirait le second qui menait sa révolution en suivant les pas de la révolution cubaine. Les deux avaient compris la guerre médiatique que se mènent les puissances dans le monde c’est pourquoi leurs révolutions étaient aussi communicationnelles.

Source: Che Guevara, INA, France 5, 17 octobre 2017

Leurs actes de naissance médiatique, il faut l’inscrire dans des circonstances particulières. Che Guevara s’illustra à la fin des années cinquante dans la bataille contre la dictature de Fulgencio Batista en Cuba. Le Che avait créé son propre organe de presse “radio rebelde” pour détruire le monopole dictatorial de Batista : « le premier réseau social de l’histoire » selon le chercheur Salim Lamrani[1]. Il pensait selon le journaliste-historien Jon Lee Anderson, que la révolution devait avoir « ses propres medias débarrassés de tous les intérêts privés bourgeois et occidentaux. » Ainsi ce n’est pas un hasard si la première mesure qui a été prise par la révolution cubaine fut la création d’un centre cinématographique, puis d’une agence de presse cubaine pour rivaliser avec les agences de presses nord-américaines et faire résonner la voix des révolutionnaires[2]. Cette guerre médiatique avait pour code “opération verbale” à Cuba. La télévision “Révolution viendra s’ajouter à ce combat médiatique pour lutter contre les campagnes de désinformation occidentale.

Hommage à  Thomas Sankara à Ouagadougou, le 14 octobre 2007.Source: RFI

« Malheur à ceux qui bâillonnent leur peuple », dira quelques années après la révolution cubaine, Thomas Sankara pour démissionner en direct devant les médias de son poste de Secrétaire d’Etat à l’information dans le gouvernement du Colonel Saye Zerbo en avril 1982. Le peuple découvrait en peu plus la personnalité de l’homme qui se rendait à son lieu de travail en vélo. A l’instar du Che latino-américain,  pour contrer les discours négatifs développés sur eux par les médias occidentaux durant leur révolution, Sankara annonçait la venue de la vérité en Sidwaya et les autres organes de presse audiovisuelle qui accompagnaient leurs pas révolutionnaires.

Les deux révolutionnaires ressentaient et combattaient les injustices à travers le monde, la plus grande qualité d’un révolutionnaire pour Che Guevara. Le fait de dénoncer les injustices à travers le monde, de défendre les opprimés, de prendre parti pour les prostitués, pour les femmes, pour l’environnement et pour la dignité humaine, a accéléré la construction de leur mythe après leurs morts.

Leurs discours respectifs à la tribune des Nations Unis où ils lancèrent des réquisitoires contre les puissances impérialistes, dénoncèrent les injustices, prenaient la défense des opprimés à travers le monde, résonnent toujours aux oreilles de ceux qui sont sur leurs traces. Deux des plus célèbres discours dans cette célèbre tribune.

Quand le premier terminait ses discours avec « La patrie ou la mort », le second lui terminait les siens en complétant la formule si célèbre maintenant au sein de la jeunesse africaine : « La patrie ou la mort nous vaincrons ». Le Che Guevara africain complétait ainsi le Che Guevara.

Il le complétait aussi dans la mort un mois d’octobre. Le 9 octobre 1967, Ernesto Che Guevara était assassiné. Le 15 octobre 1987, Thomas Sankara mourrait lui aussi assassiné par les balles de ses camarades d’armes.

En exposant le corps du Che devant les médias, en l’enterrant précipitamment comme Sankara, ses bourreaux et ceux du Che africain, pensaient qu’ils allaient exposer au monde leurs échecs et la mort de leurs révolutions. Non ! Tout le contraire allait se produire.

 Affiche Thomas Sankara et Che Guevara à Ouagadougou, photo prise le 14 octobre 2017 par Ahmed Ouoba/ AFP.

Leur histoire, leur légende, leur mythe débutèrent à ce moment-là. On ne les tue pas, on ne les enterre pas en cachette, on ne les fait pas disparaître. Pour combattre un révolutionnaire tirant sa légitimité du peuple, il faut le laisser en vie en proie aux risques des erreurs inhérentes à la nature humaine. En les tuant on en a fait des mythes indéboulonnables de la mémoire vivante. Ernesto Che Guevara le latino-américain et Thomas Sankara le panafricain, les deux Che que tout unissait, ont réussi ce pari d’immortalité pour les siècles à venir. Ils le savaient on tue des hommes mais on ne tue pas leurs idées.

Cheikh Ahmadou Tidiane Mané

source : http://cheikhmane87.over-blog.com/2019/09/ernesto-che-guevara-et-thomas-sankara-deux-revolutionnaires-que-tout-unissait.html?fbclid=IwAR27c-dqaX_d6RiDSSXVf1BpuN-F6QgFpRsiUMQHHz5XONxupp1Dn-b64k4

[1] « Che Guevara, la naissance d’un mythe », INA, Documentaire, France 5, 17 octobre 2017.

[2] Id, Idem.

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