Le lancement du projet de mémorial Thomas Sankara a eu lieu le jeudi 2 octobre 2016, date anniversaire du Discours d’Orientation Politique prononcé par Thomas Sankara en 1983. Un symposium panafricain, une marche des jeunes, en présence de l’ancien président du Ghana Jerry Rawlings, et un concert place de la Révolution ont marqué cette journée.

On remarquera que cette journée s’est déroulée en l’absence de la famille, sans qu’aucun compte rendu ne le mentionne. Elle ne s’est jusqu’ici pas exprimée officiellement.

Pour rappel, l’équipe de notre site a refusé de d’associer à ce projet, considérant dans un
communiqué qu’elle ne peut envisager une quelconque collaboration avec le gouvernement actuel tant que justice n’est pas rendue à propos de l’assassinat de Thomas Sankara et de tous les crimes du régime de Blaise Compaoré.

On notera cependant que l’exigence de la vérité et de la justice s’est exprimé tout au long de l’activité.”

JustinYarga


Acte 1 : Un symposium panafricain dédié à Thomas Sankara

Poings levés, les larmes ont coulé lorsque l’hymne burkinabè a été entonné. Au sein de la mythique maison du peuple, se trouvaient 2 000 personnes venues de la sous-région. A la tribune, le ministre de la Culture, Tahirou Barry, a enflammé l’ambiance, galvanisé les anciens et les jeunes qui revendiquent l’héritage de Thomas Sankara.

Invité pour cette journée, Tiken Jah Fakoly, le chanteur ivorien, entouré de jeunes Sankaristes, rayonne de voir cette renaissance du président-capitaine. « Je pense que c’est une forme de renaissance pour Sankara. Cela fait des années et des années que Sankara est mort, mais il est encore vivant, il est dans nos cœurs et Sankara vivra pour toujours. Vive Sankara ! » lance le chanteur. http://www.rfi.fr/afrique/20161002-burkina-faso-thomas-sankara-ouagadougou-memorial-centre-etude-recherche

[Au symposium panafricain] plusieurs thèmes ont été développés. A savoir le modèle social de Sankara, l’originalité de son système, la place de la culture et de l’homme africain dans son système, la pensée politique africaine et le panafricanisme aujourd’hui.

En ce qui concerne le modèle social, Dr Ndongo Sylla, économiste, affirme que Sankara avait bâti son modèle autour d’axes comme la santé (vaccination commando), l’éducation révolutionnaire. Pour lui, le combat de Sankara est toujours d’actualité en ce sens qu’il faut nous libérer de la servitude monétaire et du Franc CFA.

Pour Dr Abdoulaye Barro, professeur de philosophie, Sankara était un libre penseur et n’aimait pas lorsqu’on le classifiait. Il était à la fois sociologue, philosophe, économiste et homme politique. Selon lui, le développement ne se dit pas, il se fait et Thomas Sankara était dans cette lancée. Ce qui fait de lui un être atemporel, grâce à la révolution démocratique et populaire. Pour le philosophe, « la pensée politique de Sankara est un refus de la tyrannie ».

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L’historien-chercheur Lascony Nysymba Fiacre, laisse entendre que « les peuples qui ne célèbrent pas leurs héros ont eu leur destin scellé ». Il cite en exemple la République démocratique du Congo avec Patrice Lumumba, la Centrafrique avec Barthelemy Boganda. Pour lui, Sankara faisait la promotion de la romance, de la culture mais en n’oubliant pas le travail. Ce qui fait que ses idéaux ont survécu à sa disparition.

Pour le sociologue David Gakunzi, « on ne développe pas un peuple, mais un peuple se développe ». Sankara était dans cette dynamique. Son panafricanisme était celui de Lumumba, de Nkrumah et de bien d’autres l’ayant précédé. http://lefaso.net/spip.php?article73431

La foule quitte la Maison du Peuple pour rejoindre à pied la place de la Révolution, renommée à la chute de Blaise Compaoré. Poing levé pour chanter l’hymne national, Smockey du Balai citoyen. « Ça doit aller en montant, c’est pour ça qu’il était important de lancer cette idée du mémorial parce que la justice et la mémoire de Thomas Sankara, ça va ensemble », assure-t-il. http://www.rfi.fr/afrique/20161002-burkina-faso-thomas-sankara-ouagadougou-memorial-centre-etude-recherche

 Acte 2 : Une marche pour revendiquer justice pour Thomas Sankara

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En marge du lancement du projet de mémorial pour Thomas Sankara, une marche a été organisée pour revendiquer justice sur les circonstances de son assassinat. Si le mémorial est vu comme une victoire d’étape pour certains, ce n’est pas pour autant que le peuple baissera les bras en ce qui concerne le dossier Thomas Sankara surtout que ses assassins courent toujours en toute liberté. De la maison du peuple à la Place de la Nation (anciennement Place de la Révolution), la jeunesse burkinabè, accompagnée par celles Béninoise, Nigérienne, Malienne, Ivoirienne, Ghanéenne, Camerounaise, Burundaise, Sénégalaise et Togolaise en scandant les slogans ont exigé que justice soit faite au père de la révolution de 1983.

Dans la cour de la Maison du Peuple, les organisateurs s’activent à mettre de l’ordre. La marche doit commencer d’un moment à l’autre. Difficile de se faire entendre surtout que les « héritiers » de Thomas Sankara scandent de tous les côtés les slogans. La Compagnie Républicaine de Sécurité (CRS) vient prêter mains fortes. Le résultat est probant. La foule s’achemine vers la mythique place de la Nation. Danses, chants, cris ont ponctué la marche.

[À la justice militaire ça ne va pas !] Une halte a été faite lorsque les marcheurs sont arrivés devant la justice militaire, qui donne une ouverture sur l’État-major général des armées. Sans langue de bois, sinon sur un ton menaçant, la jeunesse a invité le tribunal militaire à s’activer pour que justice soit rendue dans un bref délai. Comme un avertissement à la justice militaire, un chant a été entonné en chœur par la foule et repris plusieurs fois : « quelque part ça ne va pas ! À la justice militaire ça ne va pas ! Mais pourquoi ça ne va pas ? » « Nous sommes tous débout ! » Rappellent-ils avant de poursuivre leur marathon en compagnie de Tiken Jah et Sams’Ka Le Jah. Le ministre de la culture, des arts et du Tourisme, Tahirou Barry et le vice-président de l’Assemblée Nationale, Me Bénéwendé Sankara n’ont pas voulu se faire conter l’évènement. http://droitlibre.net/une-marche-pour-revendiquer-justice-pour-thomas.html

Acte 3 : Lancement du projet de mémorial

Ce 2 octobre rappelle au médecin colonel Abdoul Salam Kaboré, ministre de la santé sous le Conseil national de la révolution, un autre 2 octobre. Celui de 1983,  date que « le visionnaire » avait choisie pour prononcer le Discours d’orientation politique (DOP).

Derrière l’idée du mémorial se cache une autre idée qui est que « la postérité a besoin de s’inspirer pour construire une Afrique libre et digne comme le voulait le Président Thomas Sankara ». Et réaliser l’édifice représente pour lui une façon d’immortaliser ses œuvres, lui rendre en partie de la justice en tant que « héros national », mais aussi et surtout « partager l’expérience de la révolution démocratique et populaire avec tous les héritiers et combattants d’une Afrique libre et digne ».

[Un financement participatif] Pour que le mémorial sorte de terre, le Président du comité d’organisation sa petite idée. « Ce mémorial doit être citoyen », a indiqué Abdoul Salam Kaboré. Vu ainsi, « c’est vous les citoyens, dit-il, qui doivent le construire de vos mains, de vos idées, de vos archives et de vos moyens financiers ».

Après un calcul rapide et après avoir écarté les bébés qui ne peuvent contribuer, il s’est retrouvé avec 10 millions de contributeurs probables. « Si chacun donne 100 francs pour le mémorial, nous récoltons  1 milliard de francs CFA », dit-il. Et « si tous les révolutionnaires africains donnent 100 francs, nous sortirons le mémorial de terre », a-t-il ajouté. Des cotisations qui devraient selon lui permettre de récolter les  5 milliards de F CFA nécessaires pour la construction du mémorial.

Le ministre de la culture Tahirou Barry n’a pas été long mais son discours a eu l’assentiment du public présent dans la cuvette de la maison du peuple. Tahirou Barry souhaite lui aussi voir sortir de terre un mémorial « digne de ce nom », un « haut » lieu de souvenirs, de commémoration, de diffusion et de promotion de ses idéaux.

Le ministre de la culture a tenu un langage révolutionnaire qui a enflammé la salle. « Ceux qui ont tué Thomas Sankara, a-t-il dit,  ont certainement coupé l’arbre en oubliant les racines. Comme nous le savons tous, la force du baobab repose dans ses racines. Ceux qui ont tué Thomas Sankara ont oublié que l’éléphant peut mourir mais ces défenses demeurent… Ceux qui ont tué Thomas Sankara avec violence ont oublié que la violence du vent n’efface pas les traces du léopard. Quel que soit ce qu’ils ont fait, Thomas Sankara demeurera vivant à jamais  ».

Le parrain, celui que le « héros national » appelait « JJR » ; a fait une halte sur le côté moral de l’édification du mémorial. « Notre soutien pour ce dont Sankara s’est levé est une obligation morale », a déclaré  John Jerry Rawlings.

http://www.burkina24.com/2016/10/02/memorial-thomas-sankara-une-obligation-morale-selon-jerry-rawlings/

À l’issue du symposium panafricain dédié au père de la révolution burkinabè du 4 août 1983, Burkinabè et pays invités ont battu le macadam de la maison du peuple à la place de la révolution. Cette marche « populaire » est significative car, elle vise à exiger la justice pour Thomas Sankara et ses camarades d’infortune.

concert place de la révolution

[La flamme de révolution].C’est dans une place de la révolution conquise que le lancement officiel du projet a eu lieu. Au rang des officiels l’on peut citer le 1er vice-président de l’Assemblée nationale, Benewendé Stanislas Sankara, au côté de Jerry John Rawlings, affectueusement appelé JJR. […] Durant cette cérémonie, la flamme de la révolution a été remise à Rawlings par le Colonel Denise Auguste Barry, ministre de la sécurité sous la transition. Les délégations venues du Sénégal, du Mali, du Niger, du Ghana, du Benin, du Togo, du Cameroun, ont par la même occasion reçu cette flamme de la révolution. Absente pour cause de panne, la flamme de la révolution destinée à la Cote d’Ivoire a été remise l’artiste Tiken Jah Fakoly. La délégation malienne après avoir pris la flamme a transmis des discours de Modibo Keita et une somme de 10 000 francs CFA pour le mémorial.

[Le compte rendu de l’Assemblée générale du comité du projet.] Luc Damiba du comité d’initiative a livré la substance des travaux de l’Assemblée générale des instances d’orientation et de gestion du projet, qui s’est tenu ce jour même au Conseil burkinabè des chargeurs (CBC). Quatre comités ont été mis en place. Il s’agit des comités d’honneur et de facilitation, d’orientation, consultatif et scientifique, et exécutif. Avec comme président d’honneur John Jerry Rawlings. Il a profité de l’occasion pour lancer un cri de cœur afin que le gouvernement désigne le Conseil de l’Entente, lieu où Sankara a été assassiné le 15 octobre 1987, pour abriter le mémorial. Même si d’autres sites propices se trouvent un peu partout sur le territoire burkinabè.

[Blaise et Sankara appartiennent à l’histoire]. Quant au ministre de la culture Tahirou Barry, il rassure du soutien total des plus hautes autorités du pays à ce projet. « C’est un pas de géant qui est franchi vers la manifestation de la vérité, la réhabilitation et la justice pour Thomas Sankara », laisse-t-il entendre. […]

JJR s’en souvient, il y a trois ans, à l’anniversaire de l’assassinat de Thomas Sankara, une forte mobilisation de la jeunesse. A cette occasion, dit-il Mariam Sankara était là. Cela signifie beaucoup de choses et c’était une démonstration que l’esprit de Thomas Sankara vivait toujours. « A partir de ce moment je me suis dit que Blaise a fait une grande erreur », confie-t-il avec toute l’émotion qui va avec. Et quand il est venu lui rendre visite ainsi qu’aux membres de son gouvernement, il a essayé de faire comprendre à Blaise Compaoré que la tension montait. Mais quand tu atteins ce niveau, selon Rawlings, tu as des difficultés à comprendre. Pour lui, « Blaise et son frère (Thomas Sankara) qu’il (Blaise) a tant haï, appartiennent à l’histoire ».

Après le lancement officiel, place est faite aux artistes pour le concert live [avec les prestations] de Dick Marcus, Abdoulaye Cissé, de l’ivoirien Tiken Jah Fakoly, du sénégalais Didier Awadi et de la malienne Nahawa Doumbia. http://lefaso.net/spip.php?article73432

Page réalisée par Justin Yarga

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